Samedi 21 septembre 2024 après-midi

À la salle des fêtes de Sers (16)

Colloque avec Bruno MAUREILLE, Thibaut DEVIÈSE, Marcel OTTE, Vincenzo CELIBERTI, Giacomo GIACOBINI

Un intéressant aréopage de personnalités reconnues. Savoirs, vivacité, questions nouvelles, pourraient être au rendez-vous.

Les origines des hommes modernes en Europe

Cette conférence est mise en parallèle avec celle de J. Jaubert, le même jour aux Eyzies de Tayac (24) et avec celle de L. Bruxelles le 28 septembre à Saint-Céré (46).

Si ces intervenants débattent entre eux, s’ils s’interrogent l’un l’autre, et surtout s’ils expriment et argumentent des avis divergents : alors ce colloque portera son nom.

Quelques outils du savoir

Le référentiel, c’est à dire les données archéologiques disponibles :

 – Une dizaine de milliers de sites du Paléolithique supérieur sont connus en Europe.

 – Les restes (les os) d’un certain nombre d’individus …. combien ?

On a là les deux référentiels de données sur lesquelles travailler.

Quelle est leur représentativité ? Pour quel type de question ?

Comment penserions-nous l’Homme si nous n’avions pas trouvé « Chauvet », cette grotte qui montre que l’art le plus ancien est tout aussi abouti que le plus récent ?

Qu’écririons-nous si nous n’avions pas trouvé « Fournol » et son « cluster », cet individu qui serait l’ancêtre de tous les « européens de souche ». Qui aurait pris sa place ? Dans quels schémas ?

Trois outils sont utilisés sur ce référentiel

 – L’anthropométrie : Sans ambiguïté ; elle permet de différencier un Néandertal d’un Sapiens. Mais elle n’est pas plus précise : les métis, ou la diversité des sapiens lui échappent. Toutefois, elle permet de raconter des histoires individuelles, humaines, à travers les maladies et souffrances qu’ont subi les os.

 – Les productions « culturelles » : 

           – L’art animalier et symbolique. Il est le ciment culturel de notre Paléolithique supérieur. Mais ses chronologies internes sont mal caractérisées. Et aucune spécificité régionale n’est solidement établie.

           –  Le complexe techno-culturel. Les grandes lignes sont fiables. Les bases en sont établies depuis le début du 20ème siècle. Les nouvelles découvertes, et les nouveaux processus d’étude, affinent régulièrement les schémas chrono-géographiques.

 – La génétique : depuis 20 ans, cet outil s’est progressivement imposé.

Le peuplement de l’Europe par Sapiens.

Il y aurait eu plusieurs vagues de peuplement de l’Eurasie depuis l’Afrique. Depuis l’Afrique ? … Oui pour la 1ère … L’origine des suivantes est-elle argumentée ?

Plusieurs vagues … c’est la génétique qui parle. L’anthropométrie n’avait rien vu. L’étude des cultures matérielles tente de recoller les morceaux, parfois sans grande conviction.

Quelques écrits assez récents envisagent la possibilité d’une conquête culturelle aurignacienne allant d’Ouest vers l’Est … en sens contraire du peuplement. Quant au Châtelperronien : il semble encore chercher sa place entre les faciès chrono-culturels du Paléolithique supérieur et le faciès anthropologique néandertalien.

Validation

En présence de découvertes à incidence majeure, telle la grotte Mandrin, ou Naledi extérieure au sujet mais bien plus importante : ne devrait-on pas trouver d’autre système que laisser le comité de lecture de Science ou de Nature établir la « vérité » ?

Jeux de noms et de sens
« Homme de Cro-Magnon », « Homo sapiens », « Homo sapiens sapiens »,  et maintenant « Homme anatomiquement moderne ». Sans compter la récente floraison, à espérer éphémère, du triste acronyme HAM qui cherche sa place
entre l’âme et le jambon.

Les modalités de peuplements de l’Europe par Sapiens.

Que sait-on vraiment ?

 – Conquêtes militaires ? Y a-t-il une seule donnée de terrain qui en montre le moindre indice ? Elles ne sont que supposées, par défaut d’autre explication.

 – Conquêtes génétiques ? Peut-on envisager que le métissage soit un facteur important de ces peuplements ; que les dites disparitions ou extinctions, ne soient que des dissolutions ?

 – La théorie de l’inadaptation aux évolutions climatiques et aux modifications de biotope est encore présente. Est-elle crédible ?  Pour l’Homme, l’hypothèse d’une fuite face aux évolutions climatiques ne peut se justifier que dans des cas extrêmes. Bien au contraire : il est le mammifère qui sait le mieux s’adapter. Il s’est installé dans les déserts, dans les immensités glacées du grand nord, au cœur de forêts tropicales, et il y a construit sa survie et son bonheur. De plus les changements s’étalent sur de nombreuses générations, laissant tout le temps nécessaire à l’indispensable évolution des pratiques quotidiennes. Cela concerne évidemment Sapiens, mais aussi, probablement, Néandertal. Si chaque nouvelle « vague conquérante » a trouvé un espace libre ou a libéré un espace : ce n’est pas pour cette raison.

 – Et que penser de ces disparitions de groupes humains suite à des maladies, voire à des comportements suicidaires collectifs. Y-a-t-il la moindre donnée archéologique allant en ce sens ?

 – Conquêtes culturelles ? L’importance des dimensions culturelles est-elle sous estimée ? Les systèmes religieux et moraux qui assurent une certaine stabilité ; les performances des armes, des outils, du confort de vie, ne sont-ils pas, chez l’Homme, de puissants acteurs de conquêtes culturelles ?

 – Des liens sont-ils proposés entre les chronologies culturelles, qui paraissent fiables, et les phases de peuplement proposées par la génétique ?

 – Le terme de « peuplement » est-il bien choisi ?

La dictature de la génétique

N’ayant que faire de la statistique, les généticiens n’ont que faire de la représentativité du matériel qu’ils étudient.

Il leur faut un bout d’os, humain en l’occurrence, en bon état, associé à une datation. Ils vont décrire l’apparence de l’individu, mais aussi, raconter sa descendance et ses ancêtres. Et bientôt peut-être, avec les progrès de l’épigénétique, raconteront-ils la vie de l’individu.

À partir des « horloges génétiques » et de rythmes de modification dans l’ADN, ils établissent des chronologies en « nombre de générations » qui tentent de remonter le temps vers des ancêtres communs. 

Même si leurs schémas ont des faiblesses théoriques, qu’ils rappellent rarement dans leurs conclusions, les généticiens réécrivent désormais la préhistoire, du moins dans beaucoup de ses composantes les plus emblématiques. Et leur apport est considérable. Mais on a parfois l’impression de préhistoriens désormais à la remorque, soumis sans discussion et remodelant leurs conclusions pour les mettre en phase avec celles des généticiens.

Deux articles de presse publiés ce 11 septembre. Ils illustrent cette « prise de pouvoir » par les généticiens. Mais que de doutes au vu des implications de certaines de leurs conclusions en termes de circulations humaines.

Les paléolithiciens peuvent-ils encore prendre le risque de bâtir des schémas d’évolutions et diffusions chrono-culturelles, sans tenir compte des données de la génétique ?

Rédaction Y. Le Guillou.

Préhistoire du Sud-Ouest

Musée du Pech Merle

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