Thaumatrope ?
Compléments à la vitrine « Laugerie-Basse »
EXPOSITION – Préhistoire(s) du MAAP – De Laugerie-Basse au Regourdou
Au Musée d’Art et d’Archéologie, 22 Cours Tourny à Périgueux (24)
Du 28 juin 2024 au 3 mars 2025
Thaumatrope : C’ est un mécanisme qui utilise une illusion d’optique. Un objet, mis en rotation, exploite le phénomène de la persistance rétinienne. Dans le cas qui nous concerne, cet objet est circulaire et les dessins de chaque côté du cercle doivent être faits en sens inverse pour que l’image complète apparaisse à l’endroit.
Le principe du thaumatrope magdalénien ? Une rotation rapide de la rondelle autour d’une « ficelle double » passant par la perforation.
Pour rappel, l’hypothèse « thaumatrope » associée aux rondelles perforées est avancée par Florent Rivère (expérimentateur) et Marc Azéma (préhistorien spécialiste du cinéma) à partir de l’exemple de cette rondelle de Laugerie-Basse.
M. Azéma : « En 1868 dans l’abri de Laugerie en Dordogne M. Hardy retrouve une rondelle en os gravé sur les deux faces. L’animal est représenté dans deux positions différentes, une sur chaque face de l’objet. Debout d’un côté, l’animal semble abattu de l’autre. Si l’on superpose le relevé des deux faces ou les photographies, on constate que les deux corps se superposent parfaitement et décomposent le mouvement de l’animal. Nous avons eu alors l’idée que le pivotement rapide à 180° de l’objet (allers retours) devait provoquer un effet optique tenant compte de la persistance rétinienne, c’est-à-dire la capacité de l’œil à conserver une image vue superposée aux images que l’on est en train de voir. Ainsi le mouvement devait se recomposer visuellement pour l’observateur, tel un dessin animé, c’est le principe du thaumatrope. Il restait à vérifier cette nouvelle hypothèse par l’expérimentation, la manipulation de l’objet original n’étant pas envisageable pour des raisons évidentes de conservation. Pour cela, nous avons choisi de reproduire fidèlement l’objet en utilisant les mêmes matériaux et outils que ceux utilisés par les hommes du Paléolithique. Fort de son expérience, Florent Rivère a procédé à cette expérimentation. »
La face présentée en vitrine
Cette rondelle en os pourrait bien être la preuve que l’invention revendiquée en 1825 par John Herschel, William Henry Fitton et John Ayrton Paris était connue depuis le Paléolithique. Sur ses deux faces, est représenté un possible chamois dans des proportions identiques mais dans deux positions différentes.
La vitrine d’exposition présente une petite vidéo de qualité moyenne pour expliquer le principe de ce thaumatrope de Laugerie-Basse. La référence à l’identification princeps (Azéma et Rivère, 2012) semble oubliée.
Autres thaumatropes paléolithiques ?
Quelques dizaines de rondelles perforées magdaléniennes sont connues, beaucoup d’entre elles sont de simples fragments. Celle de Laugerie-Basse est, vu les similitudes de décor des deux faces, la seule à être crédible en tant que thaumatrope. D’autres sont parfois présentées comme telles. Les décors sont parfois extrapolés à partir de simples fragments conservés. La moins hasardeuse provient de la grotte du Mas d’Azil (09) ; mais seule la moitié nous est parvenue.
Cette rondelle perforée du Mas d’Azil a donné lieu à de multiples interprétations. À droite de la face de droite un fin cheval tourné vers la droite a été tracé avant les incisions plus profondes. Certains doutent du caractère anthropomorphe des dessins. D’autres y voient à gauche une chasse à l’ours qui, à droite, aurait mal fini pour l’homme. A. Leroi-Gourhan y lisait à gauche un homme en érection et à droite une femme couchée, jambes écartées. Au centre, sur les deux faces, une probable patte d’ours pourrait alors être orientée vers les sexes des deux individus.
Si la rondelle de Laugerie-Basse est le plus ancien témoin de l’invention du cinéma, celle du Mas d’Azil pourrait être le témoin de l’invention concomitante du « cinéma porno ».
Toutefois : si une histoire est effectivement contée, elle l’est plus probablement sous la forme de 2 images successives que sous celle d’une composition animée.
Rédaction Y. Le Guillou
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