La Roche-Cotard à Langeais (37)

La plus ancienne grotte ornée en France

Cette conférence donnée par Jean-Claude MARQUET a eu lieu le 12 août 2024 au Cinéma l’Uxello à Vayrac (46).

Retour de conférence

C’était bien. C’était sérieux. Une vraie publication orale, introduite par un historique du site, suivi d’une présentation de la démarche scientifique, et clos par une esquisse réservée de certaines conclusions. Le tout assorti d’une volonté didactique : on perçoit une sorte d’enseignant-médiateur, qui après chaque énoncé se demande : « Me suis-je bien expliqué ? » ; « M’a-t-on bien compris ? » ; et tente de revenir en arrière pour préciser un point, une idée.

J.-C. Marquet est sans cesse très prudent sur les termes qu’il utilise, mais aussi sur ses affirmations.

Il paraît même parfois trop peu sûr de lui. À tort. S’interrogeant même sur ce qu’il considère comme des évidences. Surévaluant parfois la réalité du « plus » que peuvent lui apporter les spécialistes reconnus que sans cesse il consulte.

Mais au bout du compte, ce sont peut-être ces réserves, sur lui-même, qui ont forgé la crédibilité des recherches qu’il a dirigées à La Roche-Cotard.

L’étude de la grotte de La Roche-Cotard paraît avoir été menée de manière exemplaire. Sereinement, paisiblement, sur bien plus d’une décennie. Et, bien évidemment, en faisant appel à de multiples compétences scientifiques, et en respect des réglementations et cercles administratifs concernés. Les préoccupations conservatoires du site paraissent avoir été régulièrement intégrées.

Surtout, les chronologies relatives et les datations de la préhistoire du site ont fait l’objet d’études complexes, à facettes multiples, et avec des procédures et méthodes solides.

Au vu des travaux, de leur publication, et de la présentation qui nous a été faite : oui : 

La Roche-Cotard paraît bien être une grotte ornée moustérienne.

J.-M. Le Tensorer, P. Bahn, J.-C. Marquet, M. Lorblanchet,

devant La Roche-Cotard.

Alors : qu’en est-il de l’art néandertalien ?

La Roche-Cotard en est devenu le site de référence. Pour 3 raisons tout à fait justifiées : le masque, les tracés digités pariétaux, et la quasi-absence de sites de comparaison.

     – Si on écarte les parures qui relèvent d’une expression artistique ;

     – Si on écarte les rites funéraires qui devaient aussi en relever, du moins sous certaines de leurs composantes ;

     – Si on évite les errances des attributions aux néandertaliens de peintures de la corniche cantabrique, puis de pigments pariétaux de la grotte de Nerja (Andalousie) ;

     – Si on laisse de côté les incisions sur une paroi de la grotte de Gorham (Gibraltar) qui sont anthropiques, certainement néandertaliennes, mais pour lesquelles l’option d’une structuration graphique volontaire reste hasardeuse ;

Alors : il reste La Roche-Cotard.

La question du masque

J.-C. Marquet n’est pas enchanté  par ce terme de masque, et cela se comprend. C’est un caillou siliceux aménagé par quelques enlèvements périphériques. Dans le trou, qui est naturel, est inséré un éclat d’os de renne. Il n’a jamais été destiné à être utilisé en tant que masque. L’orientation de l’objet est moderne. L’interprétation en tant que visage l’est aussi. Sa datation (≈ 75 000 ans) est solide mais elle est peu précise (± au moins 5 000 ans).

Ce « caillou » fait environ 10 cm de large.

Mais la principale réserve est ailleurs. Si ces gens, qui savaient façonner les roches siliceuses, avaient voulu représenter un visage, ne l’auraient-ils pas travaillé un peu plus, fait un peu plus symétrique, un peu moins moche ?

Est-on vraiment sorti du schéma : œuvres néandertaliennes donc grossières ?

Les tracés réalisés avec les doigts sur des surfaces molles des parois.

Des alignements volontaires de traits, et des changements d’orientation du doigt dans certaines incisions, révèlent une intentionnalité de forme, soit du tracé lui-même, soit par détourage d’une forme naturelle de la paroi.

Un des ensembles de tracés digités.

Tout converge pour indiquer que les Néandertaliens ont volontairement imprimé des formes sur les parois. Le sens du mot « art » n’étant pas le sujet, cette recherche volontaire de forme permet d’affirmer qu’à minima, il y a expression graphique.

Dans sa conférence, J.-C. Marquet n’a pas mentionné la présence sur les parois de résidus de pigments rouges, qu’il présente toutefois dans ses publications.

Néandertal : un Homme ?

Présentant, dans une composante de ses conclusions, quelques images de l’Homme de Néandertal issues du travail d’E. Daynes, J.-C. Marquet indique que bien heureusement l’image des Néandertaliens a bien évolué, et qu’ils sont représentés aujourd’hui « bien moins méchants » qu’ils ne l’étaient avant.

Soit : la massue a disparu et les attitudes sont paisibles. Mais on pourrait rajouter qu’ils paraissent bien moins méchants que les gens qu’on croise au jour le jour au supermarché.

Tellement peu méchants qu’on pourrait les croire sortis d’une série télévisée pour adolescents sages.

Belle pilosité, chevelure (ou pelage ?) en vrac. Où sont ces vêtements et ces parures qui, sans exclusive, font l’humanité , sachant que le traitement des barbes et cheveux fait partie des parures princeps de l’Homme ?

Va-t-on franchir le pas d’envisager l’hypothèse que le blond à peau blanche et aux yeux bleus pourrait être Néandertal ? E. Daynes l’a fait, entre autres pour cet enfant néandertalien.

Ces observations ne prétendent pas remettre en cause la qualité du travail de E. Daynes. Tout comme ses collègues illustrateurs, elle ne fait que répondre aux demandeurs : les scénographes qui fixent le cadre moral des reconstitutions, cadre dans lequel les préhistoriens, incontournables conseillers, interviennent peut-être trop timidement et trop souvent par la négative. L’illustrateur est condamné, avec succès dans le cas présent, à transcrire l’humanité dans l’expression du regard et du visage. Une humanité bien tendre, comme il le lui est demandé.

Tout comme avec notre regard sur le masque, il reste encore quelques efforts pour faire de Néandertal un Homme.

Rédaction Y. Le Guillou

Préhistoire du Sud-Ouest

Musée du Pech Merle

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